Noyée dans le bocage verdoyant de la Haute-Vienne, une étendue à la végétation basse d’où émergent des arbustes rabougris et quelques chaos rocheux offrent un contraste saisissant. Toute la particularité de cette lande du Limousin de 120 ha repose sur une roche au nom on ne peut plus mystérieux, la serpentinite, une pierre d’aspect marbré, noirâtre plus ou moins zébrée de vert qui, pour certains, évoque la peau d’un reptile.
C’est ce sol particulier qui a favorisé l’installation d’une flore et d’une faune d’invertébrés très différentes de ce que l’on trouve habituellement dans la région où les sols reposent sur une roche granitique et sont donc acides. Les végétaux y sont ainsi caractérisés par un aspect nain et sur les parties d’affleurement de la roche s’est constituée une végétation représentative des sols squelettiques et secs. Dans la lande proprement dite, le rose de la bruyère se mêle au jaune vif des ajoncs, dominés de-ci de-là par quelque genévrier, tandis que sur les parties plus humides se sont installés bourdaine, bouleaux, saules… On n’y compte pas moins de 16 espèces végétales protégées de même que quelques raretés animales dans la région comme l’engoulevent d’Europe, la fauvette pitchou, le busard St-Martin… Et par les belles soirées estivales, on peut entendre le cri répétitif et discret qui s’élève de la lande comme une plainte : celui du sonneur à ventre jaune, un crapaud rare et protégé en Europe, qui a établi son habitat dans les zones humides et les trous d’eau.
Les nombreuses mares que l’on peut voir dans ce milieu façonné par l’homme sont en effet autant de sites d’excavation où l’on extrayait autrefois la serpentinite, pierre dont on se servait dans la construction, probablement depuis l’époque romaine, et surtout l’argile utilisée au 19e siècle par les artisans tuiliers dont on comptait alors une centaine de représentants ; il en restait une douzaine après guerre, 2 seulement aujourd’hui. Ce sont les activités de fauche et de pâturage qui ont toujours maintenu ce milieu en l’état de lande ; de nos jours cette mission revient à un petit troupeau de moutons dont la mission est de paître, empêchant ainsi la végétation ligneuse de pousser.
Partiellement protégée par un arrêté de biotope depuis 1993, cette lande, par son originalité géologique et sa rareté, mériterait amplement d’être classée en Réserve naturelle régionale. Un site en tous cas à découvrir en suivant les 3 km de sentier pédestre qui la parcourt, balisé du « logo » de la fauvette pitchou !