Home / Reportages / Environnement et écologie / Distillateur ambulant (Quand les fruits se transforment en eau-de-vie) 46Quand les fruits se transforment en eau-de-vie
Héritier d'une tradition centenaire et pérennisant un vieux métier patrimonial, le distillateur ambulant passe de village en village pour transformer le marc du fruit, fourni par le bouilleur de cru, en ce liquide de feu que l'on appelle eau-de-vie.
Venant d’Auxerre, dans l’Yonne, sillonnant le département du Cher de septembre à fin juillet, le distillateur installe son alambic, généralement pour un mois, dans les communes où il décide de s’installer. Dès l’aube, les premières bûches se consument dans le foyer, deviennent incandescentes, une fumée s’échappe de l’atelier et la température s’élève peu à peu dans les cuves mises en eau. Dans le campement rudimentaire, les bouilleurs de cru venus avec leur récolte piaffent d’impatience à l’idée que débute cet immuable rituel consistant à transformer les fruits gorgés de soleil et de sucre en une incolore et incroyable eau-de-vie.
Déposées dans le gosier de cuivre, poires ou prunes chantent, frémissent à petits bouillons, lentement, durant trois bonnes heures, pour donner vie à un liquide transparent qui, déjà, enchante la vue. L’odeur devient de plus en plus prégnante, la belle alchimie de l’alambic, selon la méthode à l’ancienne à feu nu, opère tranquillement jusqu’au moment tant espéré où la première larme s’échappe du robinet : la naissance magique d’un liquide transparent aux parfums enivrants appelé « eau-de-vie », « gniole » ou bien encore « goutte ».
Durant cette longue opération, l’homme au visage buriné qui exerce depuis plus d’une décennie n’hésite pas à parler de sa passion, à expliquer pourquoi il a délaissé la chauffe à la vapeur (chaudière à fuel) qui, certes, évite tout risques de brûlage des fruits, réduit le temps de distillation et augmente la production, et pourquoi son choix s’est porté finalement sur la méthode à l’ancienne à feu nu qui privilégie la qualité à la quantité et qui offre une texture et une richesse aromatique exceptionnelles. Et précisant bien que, contrairement à l'idée communément répandue, le bouilleur de cru ne fabrique pas l'alcool, apanage du distillateur !
Reportage Outback Images : Texte Chantal Gonzales, photos Alain Gaymard ![]()
|
||