Troublante et séduisante, la Fée verte hante à nouveau Pontarlier. De la culture de cette plante endémique au rituel incontournable qui préside à sa dégustation, découverte d’une liqueur qui a bien failli disparaître, accusée de « rendre fou », l’absinthe.
Du 19e siècle au début du 20e, l’absinthe a marqué de son empreinte le développement industriel de Pontarlier, alors capitale mondiale de cette liqueur. A cette époque, une vingtaine de distilleries étaient réparties dans la ville. Las, son titrage en alcool la fit accuser de tous les maux et, en 1915, une loi proscrivit la vente de l’absinthe en France. Ne subsistèrent plus alors que 2 entreprises : la Distillerie Guy, seule référence à Pontarlier, et celle d’Emile Pernod, à La Cluse et Mijoux. Il faut attendre 2001 pour que son interdiction de vente soit levée.
François Guy fabrique son absinthe selon la même recette que celle de son aïeul Armand ; aujourd’hui débarrassée des produits nocifs de l’époque, elle conserve le caractère d’une absinthe au goût fort et puissant, développant les aromes propres à la plante, la grande absinthe, cultivée à Pontarlier, dans la plaine de l’Arlier où poussent plus de 4 000 pieds. La récolte a lieu de fin juin à juillet selon les années ; coupées, les tiges des plantes sont mises en javelles, têtes en bas, pour leur séchage dans un grenier ventilé. Fin novembre, les brassées de plantes coupées sont mises en sacs et utilisées dans le courant de l’année.
La distillation se fait comme autrefois, avec de l’anis importé d’Espagne ; vient ensuite la récupération de l’alcoolat qui titre entre 68 et 72°. Une réduction est parfois nécessaire, puis c’est l’assemblage avec une infusion de plantes qui permet d’obtenir la coloration verte qui la caractérise ; l’étape finale est le passage en foudres de chêne, puis la filtration.
Au siècle dernier, l’absinthe fut à l’origine d’un enthousiasme que partagèrent nombre d’artistes, trouvant sans doute l’inspiration au fond de leur verre. Ne raconte-t-on pas que certains même y apercevaient la Fée verte ? Aujourd’hui, sa dégustation avec le matériel approprié, fontaine, verres et cuillers à absinthe, permet d’en apprécier les aromes anisés, et, en fond de gorge, le goût un peu amer de l’absinthe. Des instants exceptionnels à ne pas manquer !