Les tavaillons du Jura font leur retour
Longtemps délaissés, les tavaillons reviennent à la mode ; recherche de l’authentique, du traditionnel, la préservation du patrimoine et leur adéquation avec les nouvelles valeurs du développement durable, de la protection de l’environnement, voire de l’écocitoyenneté… ? Découverte de ces tuiles de bois fendu avec l’un des derniers tavaillonneurs du Jura qui a su, fort heureusement, assurer la relève. Au Moyen-Age, l’utilisation du tavaillon était très courante et constituait, avec le chaume, l’essentiel des couvertures des habitations ; peu à peu, ces toitures furent remplacées par des couvertures en tuiles de terre cuite ou en ardoises. En montagne, toutefois, notamment dans le Jura et en Savoie, la pratique a perduré et une enquête patrimoniale et architecturale récente a montré que cette technique ancienne suscitait un important regain d’intérêt depuis les années 1970. Dans le Jura, le tavaillon est une planchette d’épicéa refendue dans le fil du bois et employée pour couvrir des toits et des murs. Ses dimensions sont variables selon les régions ; effilé en longueur, de 10 à 14 cm de large, 40 à 45 cm de long et 15-20 mm d’épaisseur dans l’est de la France, le tavaillon est cloué sur façades et toitures et l’allure du bâtiment dépend de la technique de pose . Posés bord à bord, les tavaillons se recouvrent les uns les autres uniquement dans le sens vertical ; ils sont côte à côte dans le plan horizontal. Posés avec un recouvrement latéral, ils se chevauchent dans le sens de la hauteur et de la largeur. A épaisseur égale, les toitures en bois sont 10 fois plus isolantes que la tuile, 20 fois plus que l’ardoise, 35 fois plus que la pierre ; c’est, de loin, de tous les matériaux de toitures, le meilleur isolant thermique. Sa durée de vie est estimée à 25 ans. Installé à Lamoura, petit hameau perdu dans la forêt jurassienne, l’atelier de Robert Dromard vit encore au rythme des nombreuses passées à la fabrication de dizaines de milliers de tavaillons ; aujourd’hui, notre tavaillonneur a passé le relais à son jeune successeur, Loïc Gautheret, qui officie à Septmoncel, petite commune voisine, avec la même passion qui a animé son mentor. Avec eux, découvrons la fabrication de cette curieuse tuile de bois : choix de l’épicéa sur pied et abattage, fendage du bois avec le départoir, ou anseille, et le maillet, calibrage avec le banc d’âne et la panne, pose avec les outils du couvreur comme le tourniquet et le martel. L’utilisation du tavaillon est régie en France par un cahier des règles professionnelles, tant au niveau de sa fabrication que de sa pose, et a été officialisée par le Centre Technique du Bois et de l’Ameublement, une réglementation nécessaire pour faire connaître cette technique par les assureurs et les bureaux de contrôle.
Reportage Outback Images : Texte Jean-Claude Chantelat, photos Stéphane Godin, Benjamin Becker et (selon choix)